Le 21 juillet 2021, Monsieur le député Sylvain Waserman (groupe Modem) a déposé au bureau de l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à transposer la directive européenne sur les lanceurs d’alerte gagnée par les ONG et les syndicats en octobre 2019. Il s’agit d’une occasion historique pour renforcer la protection des lanceurs d’alerte et corriger les insuffisances de la loi Sapin 2, confirmées par un récent rapport parlementaire.
En faisant le choix d’une transposition ambitieuse, cette proposition de loi répond à de nombreuses revendications de la Maison des Lanceurs d’Alerte et constitue un signal fort envoyé aux lanceurs d’alerte ainsi qu’aux organisations qui les accompagnent.
La proposition de loi maintient la définition large du lanceur d’alerte mise en place par la loi « Sapin 2 ». Elle protège l’ensemble des personnes morales facilitatrices d’alerte, et supprime l’obligation d’agir « de manière désintéressée », notion floue et génératrice d’insécurité juridique. Elle supprime l’obligation actuelle de lancer l’alerte d’abord en interne, et permet conformément à la directive, de saisir directement les autorités compétentes, voire la presse. Les mesures de protection, qui vont au-delà des dispositions de la directive, prévoient une immunité pénale pour l’ensemble des poursuites dont peuvent faire l’objet les lanceurs d’alerte, y compris les poursuites pour vol d’information. Elles prévoient également l’instauration d’une mesure décourageant les poursuites-bâillons, puisqu’il appartiendra à ceux qui les intentent de prendre intégralement en charge les frais de justice du lanceur d’alerte. En outre, les sanctions contre les « étouffeurs d’alerte » sont renforcées : les entreprises ou administrations qui tentent de faire taire les lanceurs d’alerte par des mesures de représailles encourent désormais 3 ans de prison. Les jugements condamnant des entreprises pour de telles mesures devront en outre être publiés sur le site du Défenseur des Droits.
Outre ces mesures juridiques, des mesures de soutien financier et psychologique sont proposées. Ainsi, les autorités administratives devront s’organiser pour apporter une telle aide aux lanceurs d’alerte, qui pourront voir leur compte professionnel de formation alimenté à hauteur de 5000 euros en cas de victoire aux prudhommes. Enfin, la proposition de loi est accompagnée d’une proposition de loi organique qui va renforcer les pouvoirs du Défenseur des Droits en matière d’accompagnement des lanceurs d’alerte. Cette institution pourra désormais être le réceptacle des signalements externes et suivre le traitement de ceux-ci par les autorités judiciaires et administratives.
La Maison des Lanceurs d’Alerte soutient cette proposition de loi et appelle le gouvernement et le Parlement à garantir son adoption rapide.
La Maison des Lanceurs d’Alerte continuera à peser dans le débat parlementaire pour l’améliorer et y intégrer l’ensemble de ses revendications. Nous souhaitons notamment, pour sécuriser au mieux les lanceurs d’alerte, permettre aux personnes morales d’être porteuses d’alertes, et associer les syndicats à la mise en place des canaux d’alerte interne pour garantir l’impartialité des enquêtes et instaurer une culture de la prévention et de la transparence sur les lieux de travail.
La lutte contre la corruption, la préservation de la santé et de l’environnement et la défense de l’intérêt général exigent des actes politiques clairs, forts et courageux pour protéger les lanceurs d’alerte. La Maison des Lanceurs d’Alerte appelle le gouvernement et le Parlement à soutenir cette proposition de loi et ses dispositions les plus ambitieuses pour franchir un cap historique et enfin doter la France d’une législation de référence.
Crédit photo : Tim Sträter