Ce mardi 19 septembre, Ariane Lavrilleux, journaliste pour le média Disclose, a fait l’objet d’une perquisition et d’une garde à vue suite à la publication en 2021 de cinq articles qui révèlent notamment une opération secrète menée par le renseignement militaire français et, selon Disclose, “utilisée par la dictature égyptienne pour bombarder des civils“. La garde à vue a duré 39h. Une enquête engagée directement par la DGSI, pour “compromission du secret de la défense nationale“, a donc justifié une nouvelle atteinte à la liberté de la presse et à la protection du secret des sources. La quasi totalité des documents saisis ont été versés au dossier par le juge des libertés, situation inédite et inquiétante. Le secret des sources des journalistes, protégé par la loi sur la presse, constitue, pourtant, une des « pierres angulaires de la liberté de la presse », selon les termes de la Cour européenne des droits de l’Homme.
Le cas d’Ariane Lavrilleux n’est pas isolé : le 21 septembre 2023, deux jours plus tard, trois journalistes de Libération ont également été convoqués par la police judiciaire de Lille comme “suspects”, au motif d’une violation et d’un recel du secret de l’instruction, suite à leur travail sur l’affaire Amine Leknoun, tué par un policier de la BAC en 2022.
Ce 11 juillet 2023, le photo-journaliste Yoan Sthul-Jäger était également mis en examen pour avoir couvert l’action de militants écologistes dans une cimenterie, après une perquisition menée chez lui par l’anti-terrorisme, et une garde à vue de 80 heures en juin avec saisie de son matériel professionnel.
En 2019, plusieurs journalistes avaient déjà été convoqués à la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) après des révélations dans l’affaire Benalla et concernant des ventes d’armes françaises à l’Arabie Saoudite. Quelques semaines plus tôt, une tentative de perquisition avortée était menée à la rédaction de Mediapart, pour laquelle l’Etat a ensuite été condamné.
A chaque fois ce sont les sources des journalistes qui intéressent en priorité les autorités. Ce sont donc les lanceurs d’alerte qui sont visés, et dont on cherche à décourager la prise de parole.
Dans ce contexte et alors que s’ouvrent ce mardi 3 octobre 2023 les Etats généraux de l’information, comment croire aux promesses d’un soutien envers “ceux qui luttent pour nous informer, qui se battent pour écrire la vérité”?
La Maison des Lanceurs d’Alerte a porté le projet d’autoriser la levée du secret défense, pour les lanceurs d’alerte. Cette exigence est aujourd’hui encore d’actualité : le public a le droit de connaître des affaires de son armée.
Les pouvoirs publics doivent agir, en urgence. Ils doivent mettre fin à ces chasses aux sorcières à l’égard des journalistes et leurs sources, et condamner fermement les agissements dont ils sont l’objet. Le secret défense doit pouvoir être levé lorsque l’intérêt général le justifie, et sans que les lanceurs d’alerte et journalistes subissent des mesures de représailles.
Nous demandons également que les autorités s’engagent activement dans le travail autour de la directive sur les procédures bâillons (anti-SLAPP).
La Maison des Lanceurs d’Alerte