À 54 ans, Jean-Marc Cantais a passé plus de trente années de vie dans la police — jusqu’au point de rupture. Après des années dans les Compagnies républicaines de sécurité (CRS), il rejoint le commissariat de Pau, dans les Pyrénées-Atlantiques. Très vite, il assiste à des violences gratuites, hors de toute nécessité, exercées sur des hommes menottés, des personnes en situation de vulnérabilité, et des mineurs.
Le choc est profond. Ce ne sont pas des dérapages isolés. Ce sont des pratiques ancrées, tolérées, répétées. Et autour, un silence glaçant. Jean-Marc Cantais s’indigne et alerte sa hiérarchie.
Les représailles ne tardent pas. D’abord de la part de ses collègues : harcèlement, isolement, menaces… jusqu’à des violences physiques exer-cées à son encontre par un autre policier. Au lieu d’être protégé, il est sanctionné. Muté au commissariat de Lourdes, officiellement dans « l’intérêt du service », il est relégué à l’accueil. Une mise au placard qui ne dit pas son nom, après trente ans de service.
Peu à peu, c’est l’ensemble de l’appareil institutionnel qui semble se retourner contre lui. Des procédures sont enga-gées à son encontre par sa hiérarchie, l’IGPN et la procureure de la République pour dénonciation calomnieuse. Poursuivi à deux reprises, il est relaxé par le tribunal correctionnel de Pau, puis par la cour d’appel. Blanchi sur le plan judiciaire, il ressort cependant profondément éprouvé par l’ensemble du processus.
« J’ai tellement galéré. Ça fait presque une décennie que je subis ce harcè-lement. J’ai été privé de salaire, j’ai dû vendre ma voiture, du matériel de sport… », confie-t-il dans un entretien accordé à France Info.
Toujours en poste dans les Hautes-Pyrénées, Jean-Marc Cantais est aujour-d’hui en arrêt maladie, depuis juin 2023, après avoir été une nouvelle fois gravement menacé. Il a été depuis reconnu comme lanceur d’alerte par la Maison des Lanceurs d’Alerte et par la Défenseure des Droits.
Avec six autres policiers, il a choisi de témoigner dans La Loi de l’omerta, un livre d’Agnès Naudin et Fabien Bilheran. Non pour régler des comptes, mais parce qu’il considère que c’est son devoir — en tant que citoyen et fonctionnaire — d’informer sur des faits qui relèvent de l’intérêt général.