Lorsqu’il travaillait pour un sous-traitant d’Apple, Thomas Le Bonniec a été affecté à un programme confidentiel d’écoute et de transcription d’enregistrements à leur insu des utilisateurs de Siri, l’assistant vocal “intelligent” d’Apple. En 2019, ce lanceur d’alerte, dont on connaît à présent le nom, révélait en effet que Siri collectait bien plus que les simples requêtes qui lui étaient formulées : noms, adresses, messages, recherches… mais aussi disputes, bruits de fond et autres conversations, notamment au sujet de maladies, de religion, de sexualité ou encore de politique. Pléthores de données directement reliées au profil des utilisateurs et à la disposition d’Apple pour d’autres projets. Thomas Le Bonniec travaillait au bureau de Cork en Irlande et il rappelle que d’autres bureaux de ce type existent à travers toute l’Europe, à Paris ou à Barcelone par exemple.
C’est loin d’être la première fois qu’un “géant du numérique” fait parler de lui pour violation de la vie privée. En janvier 2019, Google s’est vu infliger une amende “record” par la CNIL pour manquements aux exigences du RGPD. En 2013 déjà, l’organisme espagnol de surveillance d’Internet sanctionnait l’entreprise états-unienne pour usage illégal de données personnelles. Sa filiale Youtube, service de vidéos en ligne, a, quant à elle, été condamnée par la justice états-unienne pour avoir collecté des informations sur des enfants de moins de 13 ans, contrairement à une loi en vigueur dans le pays depuis 1998. Facebook, Skype ou même Twitter ne font pas exception. Tout récemment encore, en février dernier, une procédure en justice contre Facebook pour violation de la vie privée a été engagée au Canada.
Fin août 2019, Apple s’était engagé à améliorer les paramètres de vie privée de Siri mais Thomas Le Bonniec rappelle aujourd’hui, dans une lettre ouverte adressée aux autorités européennes, qu’aucune action n’a été entreprise pour “enquêter sur les pratiques passées et actuelles d’Apple (et autres entreprises du numérique adoptant les mêmes pratiques) afin de mettre un terme à ces programmes [de surveillance], faire connaître la nature des données collectées et mettre à jour ce qu’ils avaient l’intention d’en faire”. Il annonce se tenir à la disposition des autorités, inquiet qu’Apple “continue de violer les droits fondamentaux” alors que “l’Union Européenne dispose d’une des réglementations les plus solides en matière de protection des données personnelles.”
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Crédits photo : Oleg Magni & Martin Sanchez.